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Mali : questions au sujet d’un double assassinat

Une prise d’otages à Kidal en pleine ville, en plein jour, suivie d’une exécution à une douzaine de kilomètres : frapper dans la « capitale des rebelles touareg » dans le nord du Mali, en enlevant Ghislaine Dupont et Claude Verlon, les deux envoyés spéciaux de Radio France internationale (RFI),

voilà qui a constitué un coup d’éclat dévastateur, au moment où le Mali s’interroge sur sa stabilisation en cours, et que l’armée française y poursuit la guerre contre Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI) et ses alliés. Nombreuses sont donc les questions autour de ce drame.

Y avait-il un « message » dans l’enlèvement ?

Faute de revendication, et en attendant de savoir si un ou plusieurs suspects ont bien été arrêtés aux abords de la scène de l’exécution, il est impossible de cerner avec précision les intentions du commando. Mais l’opération a, déjà, valeur de démonstration.

Celle de l’incapacité des forces en présence à Kidal à contrôler la ville, d’abord. Ni les casques bleus de la Minusma (Nations unies) ni le contingent de l’armée française ou celui de l’armée malienne n’ont pu empêcher un commando de quatre hommes de se saisir des journalistes et de quitter la ville avec leurs otages. Les rebelles touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) n’ont pas été plus efficaces. Voilà déjà le message.

Mais l’assassinat des deux journalistes de RFI prend une tonalité particulière en raison de leur média, très écouté dans la région, et lié, inévitablement, à la France.
Faut-il voir, dans l’enlèvement (il reste à déterminer si l’exécution est le fruit d’un plan ou des circonstances) un acte dirigé contre tout ce qui représente le pays qui fait la guerre à AQMI sur le sol malien depuis janvier ?

C’est une possibilité. Certaines sources du MNLA accusent le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), un satellite d’AQMI, d’être l’instigateur de l’opération. D’autres sources soupçonnent d’autres groupes de la même mouvance ou envisagent une manipulation du pouvoir malien pour justifier une intervention à Kidal. Reste l’hypothèse d’AQMI et de ses alliés.

Or, comme le pronostiquait une source bien informée quelques jours avant l’exécution des deux journalistes : « Ils sont en guerre, et ils ont le temps pour eux. Leur but, c’est de frapper la France ou tout ce qui la représente, dans le but de l’affaiblir, dans le but d’obtenir à la fin son départ de la région. Il va donc y avoir des attentats, des attaques, toujours à forte portée symbolique. On va bientôt voir arriver des sacs en plastiques . » Selon cette source, des projets d’attentats devraient, en bonne logique, être conçus au-delà du Mali, dans les pays voisins, Niger en tête.

Est-ce que le versement d’une rançon pour la dernière libération d’otages français a un lien avec cette opération ?

Les circonstances de la libération des quatre otages enlevés à Arlit, au Niger, en septembre 2011, demeurent floues, mais une importante somme d’argent a été versée aux ravisseurs, et des intermédiaires de la tribu touareg des Ifoghas ont joué un rôle central dans l’opération.

Y a-t-il eu des disputes, des règlements de compte, dans la foulée ? L’argent joue-t-il le rôle d’incitateur pour d’autres enlèvements ? Des rumeurs courent sur le sujet. Certaines sont fabriquées en France. En réalité, l’industrie locale de l’enlèvement se passe d’encouragement, elle bat son plein depuis dix ans.

Le problème, au fond, ce ne serait pas (aussi) les rebelles ?

Le MNLA est en pleine crise. Ses responsables sont contestés par les combattants. La démonstration par l’absurde de son incapacité à assurer un rôle de stabilisateur à Kidal vient d’être effectuée. Il est aussi soumis à la concurrence d’un mouvement concurrent, le Haut Conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), avec lequel il tente, bien en vain, de créer une union, à laquelle se joindrait le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA).

Pendant que les trois groupes échouaient à finaliser un projet de fusion au Burkina Faso voisin, les ravisseurs se préparaient à frapper à Kidal. Le MNLA doit également faire face au retour d’un autre groupe touareg, Ansar Eddine, dont le chef, Iyad ag-Ghali, est à la fois une figure influente de la tribu des Ifoghas, mais aussi une courroie de transmission avec AQMI.

Le MNLA, qui se faisait fort de jouer le rôle de force locale anti-AQMI, s’est engagé dans une coopération dans le domaine du renseignement avec l’armée française et se pose comme représentant politique de la communauté touareg, est donc perdant sur tous les tableaux.

Kidal est-elle hors de contrôle ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sous une apparence de calme relatif, Kidal est dépourvue de toute l’autorité que le MNLA, depuis sa rupture avec les groupes pro-AQMI, était supposé exercer sur la « capitale de la rébellion touareg » après le départ des forces d’Ansar Eddine et d’AQMI, fin janvier. C’est un échec, qui s’explique en partie par les dissensions au sein du groupe. Un responsable politique du MNLA en fait le constat : « A Kidal, plus personne ne commande quoi que ce soit. »

Depuis un accord signé à Ouagadougou avec le pouvoir central malien le 18 juin, les rebelles sont supposés être cantonnés et l’administration malienne faire son retour afin de rétablir l’autorité de l’état. Cela entraîne de graves tensions.

Les soldats de Serval ont, récemment, réussi à éviter un embrasement entre soldats maliens et touareg. Cette fois, les autorités centrales pourraient être tentées de mettre fin à cette « exception kidaloise ». En musclant leur présence, ce à quoi s’oppose le MNLA. En cas d’affrontements dans Kidal, l’action (ou l’inaction) des troupes françaises serait cruciale.

Il y a là un nouveau piège en gestation, alors que, dans le même temps, des combattants d’Ansar Eddine, qui s’étaient évanouis dans la nature, font un retour en force. Au cours des dernières semaines, six membres du MNLA ont été assassinés dans les environs, notamment à Abeïbara, fief d’Iyad ag-Ghali. Tous, selon une source du MNLA, étaient accusés de « donner des informations » à la France au sujet de groupes proches d’AQMI.

Le Mali est-il sur la voie de la stabilisation ?

Alors qu’il tente de réinstaurer son autorité dans la région, le pouvoir central s’efforce de trouver les conditions d’une paix des braves avec la galaxie touareg. Des mandats d’arrêt émis contre quatre de leurs responsables ont été levés le 29 octobre. Plusieurs d’entre eux seront même candidat du RPM, le parti du chef de l’Etat, lors des élections législatives qui doivent se tenir le 24 novembre.

Est-ce le signe d’une tentative pour acheter la paix en distribuant des postes, tactique qui avait sapé le pouvoir du président Amadou Toumani Touré (ATT), renversé en mars 2012 ? Certains observateurs le redoutent. Le « modèle ATT » fonctionnait sur un système d’intégration des forces politiques dans les rouages du pouvoir, au risque de ne plus tenir que grâce au clientélisme, tout en laissant le champ libre aux groupes islamistes et aux narcotrafiquants.

Le Mali, depuis, a été le terrain d’une opération anti-AQMI et d’une élection présidentielle. Le pays est encore loin de replonger dans une spirale comparable à celle de la fin des années ATT. Vendredi et samedi, des assises nationales sur la région se sont tenues à Bamako, destinées à tenter de mettre à plat une partie des griefs nationaux au sujet de cette région.

Une commission « vérité et réconciliation » devra bientôt se consacrer au Nord. Onze milliards de francs CFA ont été débloqués pour financer les premières tranches de la reconstruction de cette partie du pays, prélude à la manne de l’aide internationale : plus de trois milliards d’euros promis.

C’est peut-être là le facteur le plus important de tous les derniers événements : la compétition pour la captation de cette ressource (tel était le cas déjà dans la décennie écoulée, mais avec des sommes dix fois moindres) explique sans doute, au moins en partie, le jeu d’échecs sanglant qui se déroule actuellement dans le nord du Mali.

source : lemonde

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