BIGtheme.net http://bigtheme.net/ecommerce/opencart OpenCart Templates
Dernières Nouvelles
Home / A la Une / MALI • L’ONU plonge dans une marmite bouillante

MALI • L’ONU plonge dans une marmite bouillante

La Misma est devenue Minusma, une force de maintien de la paix qui doit défendre le territoire malien contre les menaces islamistes et les volontés indépendantistes touaregs, mais aussi veiller au bon déroulement des élections fin juillet.

Au Mali, même les radios ne résistent pas à la chaleur. Ce n’est pas une métaphore. C’est Ameerah Haq, secrétaire générale adjointe des Nations unies, qui le dit pour décrire la réalité des vastes régions désolées – et pour la plupart désertiques – du nord du Mali. « Nous ne pouvons pas déployer nos systèmes de communication mobiles à Kidal car des composants trop sensibles risquent de fondre », explique-t-elle à propos de ce qu’elle qualifie comme « l’une des missions les plus difficiles des Nations unies au plan logistique ». L’opération a pourtant été lancée.

L’Afrique ne compte plus les acronymes de charitables missions internationales de maintien de la paix envoyées sur son territoire : UNAMID, UNMIS, UNMISS, UNMIL, MONUSCO, MINURSO, MINURCAT, etc. A la liste de ces contingents de casques bleus – à l’utilité variable – s’ajoute aujourd’hui la MINUSMA, Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali.

Des défis dantesques

Vue depuis les couloirs lustrés et climatisés du siège des Nations unies à New York, la MINUSMA sera une superforce constituée de 11 200 soldats et 1 440 policiers, qui nettoieront un Mali déjà en voie de rétablissement, avec un mandat pour « assister », « stabiliser » et « soutenir » les Maliens. Ses hommes se déploieront dans le nord du pays et veilleront à ce que ces casse-pieds d’islamistes ne reviennent pas faire les 400 coups dans la région. Ils se chargeront aussi de préparer l’élection présidentielle que le Mali doit mettre en œuvre dans moins d’un mois.

Comme l’a annoncé Ameerah Haq, le travail sur le terrain ne sera pas facile. Les problèmes logistiques sont une chose : le nord du Mali est un territoire qui ne pardonne pas les erreurs, et le déploiement de toute force militaire – a fortiori de cette ampleur – est un véritable défi. Il n’y a pas que le problème des radios qui fondent sous la chaleur. Les Nations unies se demandent sérieusement si les réserves d’eau seront suffisantes dans la région pour alimenter leurs troupes. Les spécialistes étudient la possibilité d’extraire l’eau de l’humidité de l’air afin de ne pas accaparer les ressources locales.

Et c’est compter sans les difficultés politiques. Elles sont dantesques. Prenez, par exemple, la composition de la MINUSMA. Il est prévu d’envoyer de nombreux hommes sur le terrain, mais d’où viendront-ils ? La plupart seront d’anciens soldats de feu l’AFISMA (Mission internationale africaine de soutien au Mali), une autre force internationale dont les 6 000 hommes – originaires de divers pays africains – ont revêtu le béret bleu des Nations unies ce lundi. C’est un début mais la plupart des soldats africains sont loin d’être prêts à remplir leur mission. D’après les estimations actuelles, il leur faudra encore au moins quatre mois d’entraînement avant d’être pleinement opérationnels (et nous savons ce que valent ce genre de calculs). Les meilleurs d’entre eux – les Tchadiens qui ont combattu aux côtés des Français et ont effectué quelques-unes des plus belles prises chez les rebelles – n’ont accepté de quitter N’Djanema qu’à condition ne pas être envoyés au combat. Il faudra également vérifier qu’ils ne comptent pas d’enfants-soldats dans leurs rangs car une récente alerte a signalé le laxisme des autorités tchadiennes concernant la limite d’âge des recrues.

Force internationale

Paris transférera 1 000 de ses 4 000 hommes stationnés au Mali (les autres rentreront en France). L’Hexagone avait déjà envoyé bien plus d’hommes que prévu – et pour bien plus longtemps – lors de l’opération Serval, son intervention surprise de janvier dernier. Pour les Français, la MINUSMA est une aubaine qui leur permet de sortir tout auréolés de leur opération éclair contre les rebelles, sans assumer toutes les responsabilités et le long travail de reconstruction du pays. Un contingent de 500 hommes sera envoyé – et c’est une surprise – par la république populaire de Chine. C’est la première fois que ce pays participe à une mission de maintien de la paix en Afrique. Il s’agit d’un geste important et audacieux de la part des nouveaux maîtres de Pékin, qui annonce peut-être une plus grande implication de la Chine dans les affaires politiques africaines, en plus de sa domination économique. Cela fait à peu près 7 500 hommes. D’où viendra le reste des troupes ? Mystère. Et, disons le honnêtement, le discours des Nations unies sur les difficultés de l’opération ne va pas les aider à recruter. Il sera difficile – et coûteux – d’obtenir davantage de soldats.

Une fois établie, la MINUSMA sera confrontée à une série de défis plus difficiles les uns que les autres.

Commençons par cette élection qu’elle est censée aider à préparer. Sachant que l’intervention française remonte à seulement six mois et que la décision d’organiser de nouvelles élections à été prise il y a deux mois, il est presque absurde d’avoir fixé leur tenue au 28 juillet. La commission électorale malienne est aussi de cet avis. « Il sera extrêmement difficile de procéder au premier tour de l’élection présidentielle le 28 juillet », a déclaré son président, Mamadou Diamoutani, rappelant au passage que les inscriptions sur les listes électorales avaient beaucoup de retard, que les cartes d’électeur n’étaient toujours pas imprimées et qu’il restait encore toute une ville, dans le nord-est du pays qui n’est contrôlée ni par l’armée du gouvernement de transition, ni par une force internationale. Cela à moins de quatre semaines du scrutin.

La ville en question, Kidal, est contrôlée par un mouvement séparatiste touareg dont les responsables ont cédé la place à contre-coeur au gouvernement de transition. Ce sont ces hommes qui ont démarré la guerre civile au Mali l’année dernière, avant d’être écartés sans ménagement par des groupes islamistes, notamment Ansar Dine, le Mujao et Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi). Les séparatistes ont alors rallié les forces maliennes et françaises pour chasser les islamistes de Kidal (les rebelles n’ont pas d’honneur !). Ils veulent aujourd’hui être certains d’avoir été entendus avant de renoncer à leur principal atout de négociation.

Quant aux groupes islamistes, ils sont toujours là. Le travail des journalistes est dangereux dans la région, il est donc difficile d’évaluer avec précision l’ampleur des pertes subies par les rebelles. L’absence de confrontation militaire majeure semble toutefois indiquer qu’ils se sont réfugiés dans les montagnes, peut-être dans la perspective de reprendre le combat. C’est certainement ce qu’ont intérêt à faire des groupes comme Ansar Dine et le Mujao, qui possèdent un ancrage national [à la différence d’Aqmi, qui a moins d’intérêts nationaux à défendre].

Les problèmes à l’origine du conflit – la rébellion touareg qui s’est transformée en guerre civile – n’ont pas été réglés et rien n’indique qu’ils le seront bientôt – ni par le gouvernement de transition, ni par ses successeurs. L’armée menace toujours la démocratie naissante au Mali (c’est le coup d’Etat lancé contre le président élu Amadou Toumani Toure qui a précipité le pays dans la tourmente). La pauvreté et la corruption généralisées n’ont fait qu’empirer et le pays compte aujourd’hui des centaines de milliers de nouveaux réfugiés et personnes déplacées.

Cette catastrophe humanitaire requiert une réponse spécifique des Nations unies, en plus de la mission de maintien de la paix. Les autorités semblent rester sourdes aux revendications politiques des Touaregs du Nord, ainsi qu’elles l’ont toujours été depuis l’indépendance du Mali. Cette attitude est source de ressentiment contre Bamako et a été à l’origine de nombreuses rébellions et actes de désobéissance civile dans la courte histoire du Mali. C’est dans ce chaudron que les casques bleus s’apprêtent aujourd’hui à plonger. Mais, aussi brûlant soit-il, le désert restera pour eux moins hostile que la jungle politique.

About Malikahere

Check Also

Djihadistes : constructeurs ou destructeurs du Mali?

Koro : 2 enfants morts, 1 mutilé ! En cause les explosifs des djihadistes. Dans ...

Laisser un commentaire