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Karl Flittner, ancien ambassadeur: «l’Allemagne restera au Mali dans le cadre de l’UE»

Pourquoi l’Allemagne refuse-t-elle d’envoyer des troupes combattantes dans les pays africains en crise ? Sa politique pourrait-elle changer à l’avenir ?

Le diplomate allemand Karl Flittner connaît bien l’Afrique. Jusqu’en 2012, il a été ambassadeur d’Allemagne à Bamako au Mali, et il livre son analyse à Christophe Boisbouvier.

Est-ce que le nouveau gouvernement Angela Merkel est prêt à s’engager en Afrique ?

Karl Flittner : Il y a eu quelques déclarations de responsables de ce gouvernement, pas tellement de madame Merkel elle-même, mais plutôt de son ministre des Affaires étrangères et de notre nouvelle ministre de la Défense, qui ont annoncé que l’Allemagne sera disposée à s’engager de manière plus active dans la solution de crise de par le monde.

Mais à mon avis, il ne faut pas s’attendre à des changements abrupts. On s’attend ici à ce que le nombre de militaires allemands présents au Mali soit augmenté, pas de manière drastique non plus.

Et l’Allemagne restera au Mali tout à fait dans le cadre de la mission de l’Union européenne d’entraînement militaire, à Bamako et à Koulikoro, dans le domaine surtout du génie militaire et du service de santé. Ce ne sera pas du tout une mission de combat.

Après la réunification de 1990, tout le monde s’est dit que l’Allemagne allait pratiquer une politique de grande puissance. Cela semble le cas en Europe, notamment en Ukraine, mais pas du tout en Afrique. Pourquoi ?

Après la réunification, des responsables politiques ont essayé de faire comprendre à notre public ici en Allemagne qu’avec le poids que l’Allemagne a maintenant, économiquement surtout, nous serons obligés aussi de prendre plus de responsabilités dans les questions politiques, surtout dans le cadre des Nations unies.

Il y a eu pendant quelques années l’ambition d’occuper aussi un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. Actuellement, il n’en est plus tellement question.

Donc quand Gerhard Schröder, chancelier de 1998 à 2005, a envoyé des troupes en Afghanistan, c’était au moment où l’Allemagne espérait décrocher un siège permanent au Conseil de sécurité ?

Non. Ca c’était dans le cadre de l’Otan. Il y avait en arrière-fond les attentats de New York du 11 septembre. Et Gerhard Schröder avait promis aux Etats-Unis une solidarité sans faille dans la question du combat contre le terrorisme. Et l’Afrique est moins connue des Allemands aussi et même de la classe politique en Allemagne.

Est-ce que les Allemands ont conscience que les jihadistes, qui ont menacé le Mali l’année dernière, peuvent aussi frapper en Europe ?

A tous ceux que je rencontre, je le leur explique mais je crains fort que le public allemand soit très peu informé. Il faut voir aussi que – et c’est mon impression personnelle — chez beaucoup d’Allemands, quand la France s’engage en Afrique dans les pays francophones, il y a toujours sous-jacent la suspicion que la France cherche à défendre des intérêts particuliers.

Il est très difficile de faire comprendre à des interlocuteurs allemands qu’au Mali, par exemple ce qu’il y a dans le sous-sol, ce sont des Canadiens, des Sud-Africains, des Australiens qui exploitent l’or et peut-être à l’avenir l’uranium, mais la France n’a pas d’intérêt économique particulier. Ce malentendu est très difficile à dissiper.

L’Afrique est un continent dont vous avez été chassés par les Français, il y 100 ans. Est-ce que ce n’est pas aussi une raison pour laquelle vos compatriotes ne sont pas pressés de venir aider les Français en Afrique ?

Non. Au début des années 1960 au moment de l’indépendance du Congo belge, il y avait les images du roi Baudouin auquel un manifestant congolais avait volé le sabre et il y avait des titres de la presse allemande qui disait « Allemands, soyez heureux qu’on n’ait plus de colonies ».

Donc en 1960, la plupart des Allemands ne regrettaient pas d’avoir perdu les colonies, plutôt ils pensaient qu’on était soulagés de ne pas avoir à gérer maintenant une ère postcoloniale.

Donc le message des Allemands aux Français, c’est peut-être « vous avez voulu rester en Afrique, débrouillez-vous » ?

Oui (rires), un peu. Peut-être, oui.

L’Allemagne est présente au Mali mais pas du tout en Centrafrique. Pourquoi ?

Là, il est question uniquement d’un soutien logistique, transport aérien. Le gouvernement doit procéder de manière très prudente parce que dans les médias et dans le public, il y la crainte qu’après l’aventure – si j’ose l’appeler ainsi — en Afghanistan, que maintenant il y aura de nouvelles aventures en Afrique. Et il y a une crainte particulière parce que nous avons l’impression que nous ne connaissons pas suffisamment bien l’Afrique pour prendre les bonnes décisions.

Mais quand il y a des risques de massacres à grande échelle comme aujourd’hui en Centrafrique, est-ce que l’opinion publique allemande ne se sent pas concernée comme beaucoup d’autres ?

Oui, quand même. Du point de vue humanitaire, les gens sont disposés à faire des donations à la Croix-Rouge, etc. Mais le réflexe, nous, Allemands, devant intervenir, c’est relativement peu de gens qui pensent comme çà.

Donc l’Union européenne reste à faire ?

Oui mais ces derniers jours, en marge de la conférence de Munich sur la sécurité, le président de la République qui est une personnalité hautement respectée par tout le monde a fait un discours très important, qui essaie d’expliquer aux Allemands que nous sommes un pays extrêmement mondialisé par notre commerce extérieur et nous devons aussi faire une contribution à la stabilité internationale.

C’est un processus pédagogique qui avance lentement et on peut s’attendre à des changements, mais pas de manière drastique.

source : rfi

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